Fonction achats : quel état des lieux et quelles perspectives d’avenir ?
Interview de Amandine COLIN, Responsable du développement de la fonction Achats du département du Nord.
Pour CFC Formations, Amandine COLIN conçoit et anime des formations sur l’ensemble des missions de la fonction Achats, notamment sur les problématiques de performance, stratégie, cartographie et de pilotage des achats, mais aussi concernant le sourcing et la négociation.
CFC Formations : La fonction Achats a connu au cours des années passées des changements profonds : professionnalisation de la fonction, rapprochement des pratiques et des échanges avec le secteur privé, digitalisation, accentuation de la responsabilité sociale et environnementale, pression budgétaire pour la réduction des coûts, innovation, etc. Quel bilan tirez-vous de ces différentes transformations ?
Amandine COLIN : La fonction achats a effectivement connu de profondes évolutions ces dernières années en faveur de la professionnalisation du métier d’acheteur, que ce soit à travers le développement de la négociation, du sourcing et du benchmark, mais aussi la mise en place de formation et la création de service voire de directions achats.
Cependant, la légitimité de l’acheteur et le champ lexical utilisé dans les collectivités doit encore être travaillé. En effet, certaines collectivités réorganisent les services marchés vers des services achats, avec des agents identifiés sur une fonction d’acheteur ou de chargé de mission achats alors que leurs missions s’assimilent en réalité à des postes de gestionnaires marchés. Il y a donc une nécessité de mener une conduite du changement, afin de faire évoluer les organisations vers des directions achats portant une politique et une stratégie achats avec des rôles distincts entre acheteurs d’un côté et gestionnaires marchés de l’autre.
La fonction achats intègre en réalité des missions nombreuses et variées, comme les notions de sécurisation juridique des procédures, d’optimisation économique, de développement durable, d’optimisation et de fiabilité budgétaire et enfin de continuité du service public.
« Il y a donc une nécessité de mener une conduite du changement, afin de faire évoluer les organisations vers des directions achats portant une politique et une stratégie achats avec des rôles distincts entre acheteurs d’un côté et gestionnaires marchés de l’autre »
Quel état des lieux faites-vous aujourd’hui de la fonction Achats ?
La fonction achats est encore en période de mise en place, mais le contexte actuel de crise économique et géopolitique a permis une meilleure prise en compte au sein des collectivités de la place de la fonction achats. En effet, l’intégration des clauses de variation de prix et la pertinence de celles-ci par rapport au marché a des conséquences budgétaires importantes, et la compréhension de ce qu’il y a derrière les clauses permet à la fois à l’acheteur d’échanger avec les prestataires / fournisseurs sur des bases claires correspondant à des éléments de structuration du prix, et permet également à l’acheteur d’anticiper les impacts budgétaires et les besoins d’arbitrages.
Le recrutement et la rétention des talents apparait souvent comme une difficulté importante dans le domaine des achats publics, est-ce une difficulté que vous rencontrez ? Selon vous, comment y remédier ?
Oui tout à fait, c’est une réelle difficulté. Il est très compliqué de recruter des acheteurs dans le secteur public. L’attractivité financière n’y est pas similaire au secteur privé et la reconnaissance du métier d’acheteur public est encore à travailler. On m’a souvent dit : « il faut démontrer la plus-value de l’acheteur ». C’est pourtant assez simple : l’acheteur permet à la collectivité de maîtriser son budget, de faire des économies (en dehors du contexte actuel), de changer les modes de faire, et de donner aux dépenses contractuelles des orientations stratégiques en lien avec la politique de la collectivité.
« Il est très compliqué de recruter des acheteurs dans le secteur public. L’attractivité financière n’y est pas similaire au secteur privé et la reconnaissance du métier d’acheteur public est encore à travailler »
Les organismes publics font face, au même titre que les entreprises privées, a des enjeux de réputation et d’image de marque dans leurs missions de recrutement des talents mais aussi dans leurs relations avec leurs partenaires et fournisseurs. Est-ce vrai également pour la fonction Achats ?
Je dirai que oui, même si je ne peux pas parler pour l’ensemble des collectivités ! La maturité et surtout la volonté ou non de mettre en place la fonction achats dans telle ou telle collectivité est quelque chose de connu au sein du secteur public. Les très grandes disparités de rémunération entre certaines collectivités, pourtant proches géographiquement, font également parti des enjeux et difficultés de recrutement.
Et pour demain, quels sont les principaux défis de la fonction Achats ?
Les principaux défis de demain seront d’assurer la légitimité de la fonction achats et la distinction / complémentarité avec les marchés, d’intégrer le processus achats / finances, et de maitriser les coûts budgétaires des marchés et la bonne exécution des marchés. Tout cela avec pour objectif d’assurer la sécurisation juridique des achats, l’optimisation des dépenses publiques, et la continuité du service public.
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