Marchés Publics

La sous-traitance dans les marchés publics : règles et bonnes pratiques

Le 1/07/19 par CFC Formations

Pendant très longtemps, par habitude (et par facilité aussi), la sous-traitance dans les marchés publics était perçue comme une option secondaire. Cependant, avec l’évolution rapide des technologies et des compétences, elle est devenue un outil incontournable. La sous-traitance permet aux pouvoirs adjudicateurs de bénéficier de l’expertise et des ressources complémentaires d’entreprises spécialisées, optimisant ainsi la qualité et l’efficacité des prestations. Mais attention, le recours à la sous-traitance est strictement encadré par des règles visant à garantir la transparence, l’égalité de traitement et l’utilisation optimale des deniers publics.

Cet article a pour objectif de clarifier les aspects juridiques et opérationnels de la sous-traitance, et de fournir des conseils pratiques pour une mise en œuvre réussie dans le cadre des marchés publics.

 

Définition et importance de la sous-traitance dans les marchés publics

La sous-traitance peut être définie comme l’opération par laquelle un titulaire de marché public confie l’exécution d’une partie des prestations objet du marché à un tiers, appelé sous-traitant. Ce dernier intervient donc en tant que prestataire du titulaire, sans lien contractuel direct avec le pouvoir adjudicateur. La sous-traitance permet au titulaire de bénéficier de compétences techniques pointues, d’équipements spécialisés ou de ressources supplémentaires pour mener à bien le projet.

Dans les marchés publics, le recours à la sous-traitance revêt une importance cruciale. Il offre aux pouvoirs adjudicateurs un accès facilité aux meilleures expertises disponibles sur le marché, dans des domaines très variés allant des travaux de construction aux prestations de services en passant par la fourniture de biens complexes. 

En pratique, elle améliore la qualité et la performance des prestations réalisées pour les entités publiques. Elle permet d’assurer que les projets sont exécutés avec le plus haut niveau de compétence et d’efficacité, tout en optimisant les ressources et les délais. Pour les pouvoirs adjudicateurs, cela signifie également une meilleure gestion des risques et des coûts, grâce à l’implication de spécialistes pour chaque aspect technique du projet. 

 

Les trois types de sous-traitance

On distingue généralement trois grands types de sous-traitance dans les marchés publics, en fonction de la nature des prestations concernées :

  1. Sous-traitance technique : Ce type de sous-traitance concerne des prestations spécialisées ou techniques nécessitant des compétences, des qualifications ou des équipements spécifiques que le titulaire ne possède pas en interne. Par exemple, les travaux de génie civil, les installations électriques complexes ou les prestations informatiques avancées relèvent souvent de cette catégorie. En faisant appel à des sous-traitants spécialisés, le titulaire peut garantir une réalisation précise et conforme aux normes techniques requises.
  2. Sous-traitance de gestion : Ce type de sous-traitance implique la délégation de tâches de coordination, de supervision ou de gestion à un tiers. Cela peut inclure la gestion de projet, le contrôle qualité, la gestion des ressources humaines ou la supervision des travaux sur site. En déléguant ces tâches à des experts en gestion, le titulaire peut se concentrer sur les aspects stratégiques du projet tout en assurant une exécution efficace et structurée des travaux.
  3. Sous-traitance financière : Dans ce cas, une partie du financement du projet est transférée à un tiers, généralement une institution financière ou une société de crédit-bail. Cette sous-traitance permet de répartir les risques financiers et de bénéficier de conditions de financement avantageuses. En recourant à ce type de sous-traitance, le titulaire peut optimiser la gestion financière du projet et assurer une meilleure stabilité budgétaire.

 

Quel pourcentage d’un marché public peut-on sous-traiter ?

Il n’existe pas de limite légale précise sur le pourcentage d’un marché public pouvant être sous-traité. Cependant, le principe général est que le titulaire doit conserver la maîtrise d’œuvre et la responsabilité globale du projet. En pratique, il est recommandé de ne pas sous-traiter plus de 50% du montant total du marché afin de garantir un niveau d’implication suffisant du titulaire dans la réalisation des prestations.

Cette limite indicative peut varier en fonction de la nature et de la complexité du projet. Pour des marchés très techniques ou spécialisés, un pourcentage de sous-traitance plus élevé peut être envisagé, sous réserve que le titulaire conserve un rôle prépondérant dans la coordination et le pilotage global des prestations.

 

Comment déclarer un sous-traitant au marché public ? 

Le titulaire d’un marché public a l’obligation de déclarer ses sous-traitants au pouvoir adjudicateur. Cette déclaration doit être effectuée soit lors du dépôt de l’offre initiale, soit ultérieurement en cours d’exécution du marché, dès que le besoin de sous-traitance est identifié.

La déclaration de sous-traitance doit comporter des informations précises, notamment :

  • La nature des prestations sous-traitées.
  • Le nom du sous-traitant.
  • L’adresse du sous-traitant.
  • Les références professionnelles du sous-traitant.
  • Les conditions de paiement prévues.

Cette déclaration doit être faite via le formulaire DC4. Il est également demandé à chaque sous-traitant de fournir au pouvoir adjudicateur les même renseignements relatifs à la candidature demandés à l’attributaire du marché pour justifier de ses capacités à réaliser le marché (formulaire DC2)

Une fois cette déclaration soumise, le pouvoir adjudicateur dispose d’un délai légal, généralement de 21 jours, pour accepter ou refuser le sous-traitant proposé. Le refus doit être motivé, c’est-à-dire justifié par des raisons précises.

En cas d’acceptation du sous-traitant, le titulaire du marché doit conclure un contrat de sous-traitance conforme aux exigences légales. Une copie certifiée conforme de ce contrat doit être transmise au pouvoir adjudicateur. À partir de là, le pouvoir adjudicateur peut procéder au paiement direct du sous-traitant, si ce dernier en fait la demande.

Le processus de déclaration et d’acceptation des sous-traitants est crucial pour assurer la transparence et la conformité du marché public. Il permet de garantir que toutes les parties impliquées respectent les obligations légales et que les prestations sont réalisées selon les standards requis.

 

Cadre légal de la sous-traitance dans les marchés publics 

La sous-traitance dans les marchés publics est régie par un cadre juridique strict, tant au niveau national qu’européen. En France, les principales dispositions sont définies par le Code de la commande publique et le décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics.

Ces textes établissent les principes fondamentaux à respecter :

  • Transparence :  Tous les processus doivent être menés de manière claire et ouverte.
  • Égalité de traitement :  Tous les candidats doivent être traités de manière équitable.
  • Non-discrimination :  Aucune discrimination ne doit être pratiquée entre les candidats.
  • Liberté d’accès à la commande publique :  Tous les opérateurs économiques doivent pouvoir accéder librement aux marchés publics.

Ces règles imposent des obligations spécifiques aux différentes parties prenantes :

 

     1. Pour le titulaire du marché :

  • Déclaration préalable des sous-traitants :  Le titulaire doit déclarer tous les sous-traitants avant leur intervention. en utilisant le Formulaire DC4.
  • Conclusion de contrats conformes :  Les contrats de sous-traitance doivent respecter les exigences légales.
  • Transmission des pièces justificatives :  Le titulaire doit transmettre au pouvoir adjudicateur tous les documents justificatifs nécessaires.
  • Respect des délais de paiement :  Les délais de paiement des sous-traitants doivent être strictement respectés pour éviter des pénalités.

 

     2. Pour le pouvoir adjudicateur :

  • Examen et agrément des sous-traitants :  Le pouvoir adjudicateur doit examiner et approuver les sous-traitants proposés.
  • Acceptation ou refus motivé des conditions de paiement :  Les conditions de paiement proposées doivent être examinées et, le cas échéant,
    acceptées ou refusées de manière motivée.
  • Possibilité de paiement direct :  Le pouvoir adjudicateur peut procéder au paiement direct des sous-traitants agréés, ce qui assure une
    plus grande sécurité financière pour ces derniers.

 

Ce cadre légal vise à garantir que la sous-traitance dans les marchés publics se déroule dans un environnement transparent, équitable et conforme aux normes établies. Le respect de ces obligations est crucial pour maintenir la confiance dans le système de commande publique et assurer une utilisation optimale des deniers publics.

 

Conditions et modalités de paiement des sous-traitants

Dans les marchés publics, le paiement des sous-traitants peut s’effectuer selon deux modalités principales :

  1. Le paiement direct par le pouvoir adjudicateur : Cette modalité est obligatoire lorsque le sous-traitant bénéficie d’un agrément des conditions de paiement. Le sous-traitant adresse alors directement sa demande de paiement au pouvoir adjudicateur, qui procède au règlement après validation par le titulaire du marché.
  2. Le paiement par le titulaire du marché : Dans ce cas, le titulaire règle directement les sous-traitants selon les conditions convenues dans le contrat de sous-traitance. Il doit cependant pouvoir justifier de ces paiements auprès du pouvoir adjudicateur, en fournissant les pièces comptables appropriées.

Quelle que soit la modalité retenue, le respect des délais de paiement légaux est impératif pour éviter tout risque de pénalités ou de contentieux. Le Code de la commande publique prévoit notamment un délai maximum de 30 jours pour le paiement des sous-traitants directs, à compter de la réception de leur demande de paiement.

Afin de sécuriser les paiements, les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger la mise en place de garanties financières spécifiques, telles que des cautions ou des délégations de paiement.

  • Sous-traitance en cascade

Il est également possible d’avoir recours à la sous-traitance en cascade, c’est-à-dire qu’un sous-traitant peut lui-même sous-traiter une partie des prestations à un tiers. Cependant, cette pratique est encadrée par des règles spécifiques.

Le sous-traitant doit obtenir l’accord préalable du titulaire du marché et du pouvoir adjudicateur. Il doit également déclarer ses propres sous-traitants dans les mêmes conditions que le titulaire principal. La responsabilité finale incombe toujours au titulaire initial du marché.

La sous-traitance en cascade permet une plus grande souplesse mais accroît aussi les risques de perte de maîtrise du projet. Elle doit donc être mise en œuvre avec précaution et un suivi rigoureux. C’est un levier essentiel pour les acteurs des marchés publics, permettant de bénéficier d’expertises pointues et de ressources complémentaires. Cependant, son utilisation est strictement réglementée afin de garantir le respect des principes fondamentaux de la commande publique.

Il ressort de cette analyse que pour assurer le succès de leurs collaborations sous-traitantes, les entreprises et les professionnels doivent impérativement se conformer au cadre juridique en vigueur. Cela implique notamment de respecter les obligations en matière de déclaration des sous-traitants, de conclusion de contrats conformes et de modalités de paiement.