Bâtiment et Construction

7 conseils pour uniformiser et optimiser vos contrats de maintenance

Le 12/03/20 par Maurice SEILLAN, expert en gestion du patrimoine bâti

 

 

Maurice SEILLAN, Consultant spécialiste de la gestion technique immobilière et des opérations de travaux, de réhabilitation et de maintenance.

Pour CFC Formations, Maurice SEILLAN conçoit et anime des formations sur la gestion du patrimoine bâti, la gestion technique immobilière et les pathologies des bâtiments.

 

 

 

Pendant très longtemps, par habitude (et par facilité aussi) les contrats de prestations de services et de maintenance étaient toujours établis par les prestataires, à la demande du maître d’ouvrage, ce que j’appelle des contrats d’entreprises, à la limite du contrat d’adhésion (contrat préétabli avec conditions générales de ventes).

 

Conséquences : des dates et un échéancier global des contrats du patrimoine complètement décousus, des formules de révision de prix très hétéroclites bourrées d’indices plus ou moins adaptés, etc., et donc une situation lourde à gérer, difficilement maîtrisable de façon rationnelle à une échelle globale. Sans parler de leurs clauses administratives en général très insuffisantes et par conséquent sujettes à caution.

 

Ce type de contrat est la plupart du temps simpliste et à l’avantage du prestataire. De plus, il ne tient pratiquement jamais compte de l’effet de volume.

Concrètement : vous mettez une porte automatique de garage en service -> vous ne signez un contrat que pour cette porte, établi par le prestataire, au tarif plein, à la  date du jour et avec des dates d’effet et de fin non alignées par rapport à vos différents contrats en cours. Et ça pour chacun des équipements à gérer.

 

Si c’est votre cas, alors lisez vite cet article car votre gestion technique courante n’est certainement pas optimale.

« Mais ça c’était avant ! »

 

On peut toujours trouver un modèle de contrat de maintenance ou un contrat de maintenance type, mais il ne sera jamais vraiment totalement satisfaisant pour englober l’ensemble de vos équipements.

 

Les contrats de maintenance doivent être regroupés et traités comme un dossier de travaux unique alloti (c’est-à-dire un lot par type d’équipements).

 

Aujourd’hui, je ne saurais dire si beaucoup de sociétés appliquent ce principe. Cet article ne traite pas de toutes les clauses d’un contrat, mais de la façon de le rationaliser en le mutualisant.

 

Voici donc les 7 conseils que je préconise, issus de l’expérience pratique.

 

1- Créer au départ un unique DCE (Dossier de consultation des entreprises) alloti

Donc comprenant (avec le règlement de consultation, l’acte d’engagement et la DPGF bien sûr) :

  • Un CCAP (cahier des clauses administratives particulières) commun, élaboré si possible avec un juriste ;
  • Un CCTP (cahier des clauses techniques particulières) avec en première partie les clauses communes et en deuxième partie les clauses spécifiques par lot ;

2- Définissez vos conditions d’attribution des marchés

Évidemment un marché par entreprise, pour un ou plusieurs lots.

 

Ce que je vous conseille : qu’une entreprise puisse prendre plusieurs lots, que toutes les sites et résidences ne soient pas forcément attribuées au même prestataire, mais plutôt par groupes géographiques.

À vous de voir selon la localisation de vos résidences et sites et votre façon de fonctionner. Cette façon de faire permet aux entreprises attributaires une optimisation de leurs tournées, donc de leurs coûts avec comme effet des contrats à meilleurs prix pour les maîtres d’ouvrage.

 

3- Prévoyez vos marchés de maintenance en durées déterminées, pluriannuelles en précisant leur date de fin

Par expérience, 3 ans est une bonne durée pour que les prix même révisés restent dans les prix marché, avec un investissement correct de la part du prestataire dans la réalisation de ses tâches.

 

Pour que cela soit vraiment intéressant pour un prestataire, et par conséquent pour vous, évitez si possible les durées trop courtes, comme un an ou deux par exemple. De plus les périodes courtes augmentent la fréquence de renouvellement de vos contrats, ce qui aura pour effet d’alourdir substantiellement votre temps de gestion des contrats.

 

Pour certains équipements, dits gros équipements, comme les ascenseurs ou les chaufferies collectives, 5 ans est une bonne durée pour que les prestataires s’impliquent plus dans leurs marchés et leurs responsabilités.

 

Notamment par exemple pour que le contrôle technique obligatoire des ascenseurs, instauré par la loi SAE tous les 5 ans, ne leur soit pas défavorable ou que les contrats à bonus/malus (dits à intéressement, sur les consommations d’énergie par exemple) leur soient suffisamment profitables, et donc incidemment pour vous aussi.

 

Indiquez clairement que le marché est conclu à durée déterminée et qu’il se terminera purement et simplement la date de fin de sa dernière année.

 

Évitez la tacite reconduction, et inscrivez la reconduction expresse écrite à la place (voir le point suivant).

 

N.-B. : pour ceux qui veulent pouvoir rompre le contrat avant le terme contractuel, vous pouvez parfaitement insérer une clause de période d’essai au démarrage du contrat (par exemple 3 mois pour les contrats à 3 ans, 6 mois pour les contrats à 5 ans), ainsi qu’une clause donnant la possibilité, au-delà de la période d’essai, aux 2 parties de rompre avant le terme contractuel si des changements substantiels ou autres sont constatés, avec un préavis de 2 à 4 mois selon la durée prévue du contrat, et sans préavis et sans indemnités en cas de manquements graves.

 

4-Exclure toute clause de tacite reconduction

Déjà parce que c’est un piège si on passe le préavis …

 

La tacite reconduction n’est absolument pas obligatoire et est surtout à l’avantage du prestataire.

 

Vous n’avez aucun intérêt à le faire, sauf si ce principe vous semble confortable pour ne pas avoir à gérer des résiliations et des appels d’offres et laisser vos contrats filer dans le temps. Mais au bout de 5, 10, 15 ans, avec le jeu des révisions, leurs montants seront très décalés par rapport aux prix marché.

 

J’ai déjà vu le cas de contrats de plus de 20 ans, à des prix n’ayant strictement plus rien à voir avec ceux du marché !

 

Beaucoup d’abus se sont produits, notamment quand la tacite reconduction est mentionnée à 5 ans ! Voire 10 ans comme j’ai déjà pu le voir dans des contrats d’entreprise !

 

Mais ça marchait, car la plupart du temps, on ne prenait pas la peine de consulter ce que mentionne la loi et nombre de prestataires ET DE CLIENTS pensent que des clauses écrites et signées sont forcément valables (principe des clauses abusives ou illicites).

 

Si pour x raisons vous souhaitez garder une clause de reconduction, indiquer que cette dernière se fera de manière expressément écrite.

 

Et si vous décidez de reconduire expressément vos marchés, sachez que vous n’êtes pas absolument pas obligé de prendre la même durée qu’initialement.

 

Si vous voulez être sûr que vos contrats ne passent pas la durée définie, vous pouvez aussi parfaitement les résilier à leur date prévue de fin dès leur prise d’effet.

 

En dehors de ce principe, le marché cesse purement et simplement à la date de son terme, comme indiqué au point 3, sans opérer ni résiliation ni préavis !

 

Cela coupera court à la fois à la fameuse clause de reconduction tacite qui, si on l’oublie, relance votre contrat pour un tour et à l’oubli de la bonne vieille lettre recommandée de résiliation et du préavis qui en général va avec.

 

La fin d’un contrat est ainsi automatisée !

 

Ce principe est inspiré du code des marchés publics.

 

Cette stratégie organisationnelle, tout à fait légale, est très peu connue et utilisée.

 

5- Uniformiser et simplifier la facturation et la révision annuelle des prix

Pour la facturation : imposez une facturation « mi-chemin », une partie en mars et le solde en septembre.

 

Cela ne vous fera que 2 contrôles de factures de contrat par an au lieu de 4, car c’est surtout la facturation trimestrielle qui est répandue.

 

Pour avoir pratiquer la facturation mi-chemin, elle toujours très bien fonctionné et a toujours été très bien acceptée par les prestataires quels qu’ils soient, y compris les grosses structures.

 

Concernant la clause de variation des prix, ne mentionnez que 3 formules de révision ne contenant que 2 indices maximum :

 

1. Utilisez une formule mixte (partie fixe, ICHTrev-TS-IME, FSD1) avec un coefficient plus fort sur le ICHT pour les lots à base principale de main-d’oeuvre, ou avec un coefficient plus fort sur le FSD pour les lots techniques, compris ascenseurs et chaufferies ;

 

2. Pour le lot Espaces verts, utilisez l’index EV4 seul, ou avec un fort coefficient si vous le complétez avec le EV2 ;

 

Vous n’aurez ainsi que 3 formules à calculer avec seulement 3 index ou indices au total, 4 maximum, en tout et pour tout pour la révision annuelle de tous vos contrats.

 

Ces 3 formules suffiront pour couvrir parfaitement l’ensemble de tous vos marchés d’entretien et de maintenance.

 

Vous y gagnerez une grande simplification de votre travail administratif et ainsi une économie de temps considérable !

 

J’ai trop vu de contrats avec chacun une, voire plusieurs formules spécifiques, parfois même avec 3, 4, 5 indices chacune !

 

Ce type de formules qui vous obligent ainsi à passer des heures à chercher les différents index, à les intégrer dans toutes ces formules différentes en veillant qu’elles correspondent aux bons contrats, ou à la bonne partie du contrat.

 

Bref un vrai bon gros boulet chronophage de travail administratif. Donc simplifiez et uniformisez !

 

Par ailleurs, si vous avez intégré contractuellement des travaux de gros entretien ou de remplacement d’équipements pendant la durée du contrat :

  • Spécifiez clairement au CCAP que le ou les prix remis pour ces travaux sont fermes et forfaitaires, ainsi le prestataire en tiendra compte dans le chiffrage initial et ni vous ni lui n’aurez à vous préoccuper d’une révision sur ces prix-là.

 

6- Aligner les dates d’échéances des contrats en cours avec les nouveaux marchés

Comment faire ?

Vous avez résilié tous les contrats arrivés à échéance.

 

Pour les contrats non arrivés encore à leurs échéances : pour le premier appel d’offres, tous les résilier aussi, quelles que soient les dates, même éloignées, en respectant bien sûr les préavis, et pour chacun des équipements concernés, intégrer dans le nouveau DCE (Dossier de Consultation des Entreprises) un calendrier de prises d’effet pour ces derniers par résidence et par lot.

 

Autrement dit, dans le premier appel d’offres, les attribuer avec une date d’effet individualisée et en revanche avec la même date de fin du nouveau marché.

 

Dans les cas où un prestataire attributaire se voit attribuer un ou des équipements qu’il a déjà en charge mais dont les contrats ne sont pas encore arrivés à échéance, négocier une rupture immédiate du ou des contrats encore en cours pour qu’il reprenne immédiatement ces équipements dans le cadre de son nouveau marché, surtout si le nouveau prix est plus intéressant.

 

Par la suite, une fois la première durée écoulée, tous vos contrats seront alignés aux mêmes dates.

 

Pour les équipements mis en service ultérieurement : à la suite d’une acquisition ou d’une construction à mettre en exploitation, procéder de la même façon pour les absorber dans les marchés en cours et aligner les dates d’entrée de jeu.

 

7- Intégrer dans l’appel d’offres une demande de bordereau de prix unitaires (BPU)

Pendant la durée d’un contrat, il y a toujours des dépannages qui demandent un remplacement de pièces.

 

Le BPU (Bordereau de Prix Unitaire) permettra de fixer contractuellement les prix de fourniture des pièces détachées les plus courantes, la main d’oeuvre, si vous avez bien construit votre DCE, étant intégrée au contrat pour la technicité courante.

 

Il fixera aussi les taux horaires de main-d’oeuvre spécialisée non contractuelle (metteur au point, équipement spécial, études ou travail spécifiques etc.).

 

Ce BPU étant issu d’une mise en concurrence, vous serez quasi-assuré d’être dans les bons prix et ainsi de ne pas avoir de mauvaises surprises, au moins pour les réparations courantes.

 

Comme je le disais à l’occasion d’un autre article, j’ai instauré ce type d’appel d’offres et de marchés dans une société qui pensait avoir plus ou moins rationalisé ses contrats.

 

Cette façon de faire fonctionne parfaitement !

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